systèmes de préfabrication lourde

1940 1945 1950 1955 1960 1965 1970 1975
1945

L’Europe d’après-guerre montre un grand besoin de logements. On regrette pourtant une pénurie de matériaux de construction et de main-d’œuvre qualifiée.

1946

Invention du système Cauvet (France), un système de préfabrication lourde.

1948

Raymond Camus, ingénieur français, dépose un brevet pour son système de préfabrication lourde.

1950s

Le marché du préfabriqué lourd est florissant, en France, mais aussi dans le reste de l’Europe.

1955-1958

Construction de la Magnanerie à Forest. Une partie du bâtiment est érigée avec des murs transversaux porteurs, l’autre partie est construite avec le système Barets.

1956-1972

Construction de la Cité Modèle à Bruxelles sur bases des systèmes Barets et Cauvet.

1960

Wonen/Habiter publie une interview de J. Barets, le directeur général de la Compagnie française d’Engineering Barets.

1961

Construction de 140 maisons à Woluwe-Saint-Lambert avec le système Barets.

1965

Au milieu des années 1960, Camus détient six usines en France et 16 dans d’autres pays tels que le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, la Russie et l’Algérie.

1969

Une enquête révèle que seulement 2% des maisons construites en Belgique profitent des techniques de construction industrialisées comme la préfabrication lourde.

1970s

Déclin de la préfabrication lourde en Europe. Les causes sont le malaise général dans le secteur de la construction, les normes plus élevées en matière d’isolation thermique et les nouvelles tendances architecturales.

Le terme « préfabrication lourde » ou « système de préfabrication lourde » désigne les systèmes de construction industrialisés composés de panneaux de sol ou muraux porteurs de grande taille, préfabriqués en béton armé et produits en masse dans l’idée d’un ensemble complet et fermé. Complet parce que le système regroupait tous les éléments et composants nécessaires à la création d’un immeuble en entier, fermé parce que la configuration géométrique des éléments et les détails de connexion étaient spécifiques à la marque (les éléments étaient donc incompatibles avec les éléments d’autres systèmes). Au sein de chaque système, un nombre restreint d’immeubles prédéfinis pouvaient être construits avec un assortiment relativement réduit de composants standards. Les limites de ces systèmes étaient compensées par les avantages économiques et logistiques. En effet, l’économie était l’un des principaux avantages qu’offrait la préfabrication lourde. En outre, la construction industrialisée permettait de réduire le temps de construction et de limiter la main-d’œuvre spécialisée, ce qui augmentait d’autant l’avantage financier. D’un autre côté, il fallait repenser le processus de conception et de construction : les caractéristiques du système devaient être intégrées dans la conception architecturale. De plus, la flexibilité limitée du système et l’échelle minimale requise pour le projet de construction représentaient deux revers importants pour la préfabrication lourde. Alors que cette dernière connut un beau succès dans les autres pays d’Europe occidentale et orientale durant l’après-guerre, elle éprouva plus de difficultés à gagner des parts de marché en Belgique.

reconstruction d’après-guerre

L’émergence de la préfabrication lourde fut fortement liée au besoin énorme et urgent de logements bon marché dans toute l’Europe après la guerre et à l’importante pénurie de matériaux de construction et de main-d’œuvre qualifiée à cette époque. Cette situation ouvrit la voie aux méthodes de constructions alternatives susceptibles d’accélérer le rythme de construction et d’augmenter la productivité. Au cours des années 1950 et 1960, l’accroissement de la population et le développement scientifique et technique de l’industrie de la construction entretinrent cette atmosphère favorable et accrurent le succès de la préfabrication lourde. Dans les années 1970 toutefois, la préfabrication lourde connut un déclin. En France, par exemple, où la préfabrication lourde était très populaire, plusieurs entreprises durent fermer boutique à la fin des années 1970, la faute au malaise générale dans le secteur de la construction, aux normes plus élevées concernant l’isolation thermique et aux nouvelles tendances architecturales.

La préfabrication lourde fut particulièrement florissante en France et également ailleurs en Europe, à partir des années 1950. L’un des premiers systèmes français – et des plus réussis aussi – fut celui conçu par l’ingénieur français Raymond Camus. Ce système, breveté en 1948, fut approuvé par le Centre Scientifique et Technique du Bâtiment français en 1949. Mis en œuvre à très grande échelle, il compta parmi les moyens qui permirent au gouvernement français d’atteindre l’objectif très ambitieux de 20.000 logements par mois. Le système Camus est devenu le symbole de la préfabrication lourde « à la française » dans le monde entier. Au milieu des années 1960, Camus détenait six usines en France et 16 dans d’autres pays, comme le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Italie, la Russie et l’Algérie.

La France fut pionnière dans le développement de la préfabrication lourde. Outre le système Camus, plusieurs systèmes de préfabrication lourde français fleurirent au niveau international, comme Coignet, Barets, Cauvet, Estiot, Tracoba, Balency (Balency et Schuhl) et Porte des Lilas. D’autre part, des dizaines de systèmes de préfabrication lourde et des méthodes de construction industrialisés furent développés dans le Royaume-Uni, l’Allemagne, les États-Unis, la Scandinavie et des pays d’Europe de l’Est. Ils se distinguaient le plus souvent entre eux par la composition des matériaux, le procédé de production et de durcissement, la succession de différentes couches au sein d’un même élément, les dimensions de l’élément et les connexions.

caractéristiques génériques

Même si chaque système avait des particularités propres, certaines caractéristiques générales étaient partagées par la plupart des systèmes de préfabrication lourde. D’habitude, un système se composait d’un nombre déterminé de panneaux pour façades, planchers et murs intérieurs, et d’escaliers préfabriqués. Les panneaux avaient jusqu’à 8 m de long (correspondant aux dimensions d’une pièce) et entre 6 et 30 cm d’épaisseur. Le processus de production était hautement mécanisé. Les panneaux étaient généralement formés horizontalement dans des moules en acier, dans lesquelles des barres d’armature, des crochets et d’autres éléments pour le transport, le levage et le jointement des éléments, et des châssis de fenêtres et de portes étaient insérés à l’avance. On pouvait utiliser différents types de béton, parfois successivement dans le même panneau, selon sa fonction. La capacité isolante pouvait être améliorée par une couche interne d’isolation. Après durcissement et un traitement de surface, les éléments étaient transportés sur le chantier et mis en place. Les suspentes métalliques et les barres d’armature protubérantes étaient entrelacées et le joint était rempli avec du béton coulé sur place.
Au cours des années 1950 et 1960, l’équipement technique et les conditions de production de l’industrie de préfabrication s’étaient améliorés. Cette professionnalisation a donné lieu à une précision accrue, simplifiant le montage. Autre évolution notable à partir de la fin des années 1950 était la tendance à plus de valeur ajoutée, pas seulement par des éléments avec différentes couches, mais aussi par l’intégration de fonctions secondaires, par exemple les châssis de fenêtres et de portes (d’abord en bois, à partir du milieu des années 1960 aussi en acier), les tuyaux, les câblages et les matériaux de finition intérieurs et extérieurs (plâtre, revêtement de sol, etc.).

préfabrication lourde en Belgique

D’après une enquête menée en 1969, à la demande de la compagnie financière Kredietbank, seules 2% des maisons construites en Belgique bénéficiaient de techniques de construction industrialisées comme la préfabrication lourde. Ce pourcentage était sensiblement inférieur à celui du Royaume-Uni, de la France, de l’Allemagne et de pays d’Europe de l’Est, où ces techniques concernaient 10 à 30% du total des nouvelles maisons. Si ces systèmes de construction industrialisés étaient moins populaires en Belgique, c’est notamment parce que les grandes entreprises de construction n’y étaient pas légion : l’industrie belge de la construction était dominée par des petites et moyennes entreprises, de moins de quatre employés pour la plupart, et non équipées pour la mise en œuvre de ces techniques. De plus, la politique de gouvernement n’était pas très favorable à la préfabrication lourde. A partir de 1948, le gouvernement avait indirectement encouragé des méthodes de construction traditionnelles avec sa loi De Taeye. Cette loi avait stimulé les acquisitions privées de maisons individuelles par le biais de primes et de crédits. Les primes s’appliquaient aux petites maisons individuelles, qui étaient généralement construites par de petites entreprises aux méthodes de construction plutôt traditionnelles. La maison De Taeye (dont 100.000 exemplaires avaient été construits en cinq ans à peine) se distinguait par ses murs en briques, ses menuiseries extérieures en bois et son toit en bâtière, couvert de tuiles céramiques.

La loi De Taeye eut un impact négatif pour les projets à grande échelles de logements collectifs à plusieurs étages, précisément le domaine d’application où les systèmes de préfabrication lourde étaient compétitifs. Cela n’a toutefois pas empêché le secteur de la construction de maisons individuelles en Belgique d’après-guerre de profiter du développement technique de l’industrie de la construction. Si la préfabrication lourde fut boudée, la préfabrication légère ou partielle fut en revanche adoptée, en recourant notamment à des matériaux de construction « traditionnels améliorés » comme les hourdis et le béton léger (voir chapitres 1 et 4), ceux-ci étant plus faciles à intégrer dans la pratique de construction courante que les systèmes de construction industrialisés et les systèmes de préfabrication lourde.

Le manque de succès rencontré dans la pratique en Belgique est perceptible dans la littérature belge contemporaine, qui fait peu référence à la préfabrication lourde. Les journaux d’architecture d’après-guerre ne parlaient que peu de la technique et des applications de la préfabrication lourde ; du coup, et vu les limites du marché, les fabricants ne faisaient pas de publicité dans ces journaux. En 1960, le journal Wonen/Habiter, édité par l’organisme semi-gouvernemental Institut national du logement (INL), publia une interview de J. Barets, directeur général de la Compagnie Française d’Engineering Barets, une des plus importantes entreprises française de préfabrication lourde. Toutefois, il s’agissait davantage d’un plaidoyer en faveur du concept que d’une description technique. En 1964, ce même journal fit l’exposé de la réalisation du quartier Ban Eik de Wezembeek-Oppem, conçu par les architectes du Groupe Structures (1957-1960), dans laquelle deux tours à appartements avaient été érigées selon le système Barets. En 1965, le journal Architecture fit l’une des critiques les plus exhaustives de la littérature contemporaine belge sur la préfabrication lourde. Ce numéro spécial comprenait une description technique succincte de 12 systèmes (Cauvet, Barets, Camus, Tracoba, Coignet, Bianchina, Estiot, Porte des Lilas, Fiorio, Costamagna, Pagnanini et Technove) et de quelques études de cas. Parmi les exemples-phares de cette technique, on retrouve la Cité Modèle à Bruxelles, construite avec les systèmes Barets et Cauvet. A notre connaissance, ces deux systèmes français sont les seuls à avoir été mis en œuvre à Bruxelles durant l’après-guerre. Leur flexibilité (en dimensions et en composition) motive certainement ce choix. De plus, le fait qu’ils puissent être préfabriqués sur chantier, au pied des immeubles à ériger, joua énormément en leur faveur, surtout en l’absence d’usine importante dans le domaine de la préfabrication lourde en Belgique.

barets

Le système Barets se compose d’éléments porteurs de façade, de dalles de sol, de murs transversaux (non-)porteurs, d’escaliers, de cheminées et éventuellement de portiques. La combinaison de portiques et de murs porteurs sortait de l’ordinaire pour un système de préfabrication lourde. L’intérêt majeur du système Barets résidait dans sa flexibilité considérable : au-delà de la grande variété de composition, de finitions et de dimensions, la structure des immeubles pouvait également être choisie (avec ou sans portique). Les éléments étaient préfabriqués à proximité du chantier, sur un site de construction temporaire. Après concertation avec la société-mère, des entrepreneurs (réputés pour les projets de construction à grande échelle) pouvaient obtenir une licence leur permettant de mettre le système en œuvre. Un service d’étude technique était également mis à leur disposition par Barets. Les coffrages étaient fournis par Barets ou par l’entrepreneur lui-même. Une fois coulés, durcis et démoulés, les éléments étaient mis en place avec une grue. Pour obtenir une construction monolithe, les joints entre les éléments étaient remplis de béton coulé sur place. Les barres d’armature et boucles de fer qui ressortaient des éléments de plancher, des murs et des portiques étaient entrelacées, avec ou sans barre d’armature ou câble précontraint entre elles.

Les panneaux de façade mesuraient souvent environ 2,75 m de haut et 3,20 m de large ; les dimensions exactes dépendaient des plans architecturaux et des coffrages de l’entrepreneur. La préfabrication commençait avec la préparation des moules, en ce compris l’insertion des encadrements de fenêtres et de portes. La première couche en fond de coffrage était une plaque de plâtre, formant la face intérieure des panneaux. Venait ensuite une couche de polystyrène expansé de 2,5 cm. La couche suivante, destinée à supporter les charges, se composait de béton armé et de blocs de remplissage céramiques ou en béton léger. La couche finale en béton formait quant à elle la surface extérieure : celle-ci pouvait éventuellement être finie avec un traitement de surface jouant sur la texture ou la couleur du béton, selon la conception de l’architecte. La valeur U des panneaux de façade était comprise entre 2 et 4 W/m²K selon l’épaisseur de la couche d’isolation. Les portiques se composaient de colonnes et de poutres en béton armé ou précontraint et comptaient une à quatre travées de 3 m chacune. Les boucles d’armature qui en ressortaient pouvaient être liées aux barres d’armature protubérantes d’autres éléments et recouvertes de béton coulé sur place. Les éléments de planchers étaient disponibles sous différentes formes : des dalles plates et massives en béton armé, des dalles plates comprenant des creux (destinés à accueillir des viabilités), et des dalles nervurées (minces, avec des rainures sur les côtés et au milieu). Les murs transversaux étaient en béton armé, parfois en combinaison avec des blocs de remplissage pour réduire la densité et améliorer l’isolation acoustique. Ils étaient soit laissés en l’état, nus et lisses, soit enduits de plâtre. Les murs transversaux mesuraient généralement 2,75 m de haut (même hauteur que les panneaux de façade) et 10 cm d’épaisseur. Si nécessaire, le mur pouvait accueillir une couche de polystyrène expansé, ou encore des conduites pour les viabilités. Les escaliers et les cheminées étaient préfabriqués en demi-hauteur d’étage, en béton armé. Les cheminées bénéficiaient quant à elles d’une couche interne supplémentaire en béton léger.

cauvet

Le système Cauvet, inventé en 1946, était utilisé pour les tours à appartements comme pour les constructions basses. Il se basait sur des éléments de façade en béton, avec des creux verticaux (de 30 à 70 cm de large) partiellement remplis de béton après avoir été mis en place. Ces éléments pouvaient être produits en usine ou sur site, avec des moules spécifiques pour les creux. Le système offrait une grande flexibilité en matière de dimensions des éléments et des creux, de manière à correspondre au mieux aux plans architecturaux. Le système Cauvet fut mis en œuvre en Belgique par les entreprises Structo et Strabed.

Les éléments de façade étaient coulés dans des moules en acier en couches successives de 6 cm de béton (extérieur), 2 cm d’isolation de fibres de verre ou de polystyrène expansé, 2,5 cm de béton armé, un creux et 4 cm de béton (intérieur). Pour créer un pan monolithe, des barres d’armature traversaient la couche d’isolation et reliaient les couches de béton extérieures et intérieures (six barres par mètre carré). Les murs intérieurs étaient préfabriqués de la même façon, avec de larges creux entre deux couches de béton. Les éléments creux de plancher, également produits suivant le même procédé, étaient supportés par les éléments de mur. Afin de permettre aux éléments de façade et de plancher de s’imbriquer, le sommet des panneaux de façade était légèrement plus bas du côté intérieur que du côté extérieur. Les barres d’armature qui dépassaient des éléments de plancher étaient recourbées vers le haut, pour s’enficher dans les creux verticaux de l’élément de façade suivant ; ces creux étaient ensuite partiellement remplis de béton sur environ 30 cm de haut, créant ainsi une connexion coulée sur place entre les planchers et les murs. Les joints verticaux entre deux éléments de mur intérieur étaient remplis de béton, les joints entre les panneaux de façades étant quant à eux remplis de matériau plastique ou bitumeux et de mortier.

applications à Bruxelles

Le système Barets était le système de préfabrication lourde le plus appliqué à Bruxelles. Du fait de sa flexibilité, il n’était pas seulement utilisé pour les tours à appartements, mais aussi pour les constructions basses, plus courantes. L’Institut national du logement y a notamment recouru pour un projet de logement social de 140 maisons basses à Woluwe-Saint-Lambert. Ces maisons faisaient partie du quartier ‘les Pléiades’ (commencé en 1961 environ), conçu par les architectes du Groupe Alpha. Les murs de façade porteurs, préfabriqués sur site, se composaient d’une couche de plâtre, de panneaux d’isolation (roseau) et de béton armé, avec une finition lavée et une plinthe en gravier noir. Le quartier des Pléiades se composait également de tours à appartements et de maisons traditionnelles : comparer les systèmes de construction a permis de souligner certains avantages du système de préfabrication Barets, comme des murs plus fins, une plus faible consommation de matériaux, l’absence de fissures dues au retrait du béton, une exécution rapide, pas d’ossature externe et moins de pertes calorifiques.

La Magnanerie et La Cité Modèle sont probablement les exemples les plus célèbres de l’utilisation du système Barets dans les tours à appartements. L’immeuble La Magnanerie à Forest (1955-1958), sorte de boomerang de 16 étages, est né du crayon de l’architecte Claude Laurens, succédé par l’architecte Jacques Cuisinier. La technique de construction a également changé en cours de progression du projet : au-dessus des portiques au rez-de-chaussée, la moitié du bloc était composée de murs transversaux porteurs (non construits selon un système en particulier), alors que l’autre moitié était construite selon le système Barets. Les raisons de ce changement de mode de construction restent un mystère.
La Cité Modèle constitue l’exemple le plus important du système Barets à Bruxelles. En effet, les immeubles à appartements de la première étape ont été construits suivant ce système, avant de passer au système Cauvet par la suite. Dans son ensemble, la Cité Modèle est un complexe de logements sociaux très important, faisant coexister plusieurs types de logements, des maisons unifamiliales mitoyennes aux tours à appartements. Elle fut conçue par un collectif d’architectes unique : Renaat Braem, Victor Coolens, Groupe l’Equerre, René Panis, Groupe Structures et Jean Van Doosselaere. L’idée de recourir au système Barets n’a pas été émise par ce groupe d’architectes. Lors du premier tour d’appel d’offre, la préfabrication lourde avait été suggérée par certains candidats pour son (léger) impact positif sur le budget. Les architectes ont accepté l’idée et dès lors adapté leur projet. Prévu à l’origine pour faire partie de l’Exposition universelle de 1958 à Bruxelles, le projet n’a été achevé qu’en 1972.
Les cinq premières tours à appartements (blocs I, II, III, V et VIII) ont été construites par l’entreprise de construction Entreprises Générales des Travaux d’Anderlecht (EGTA) selon le système Barets. Les panneaux de plancher et de mur étaient tous coulés horizontalement, dans des moules à béton. Pour les planchers, d’une portée d’environ 5,60 m et d’une épaisseur de 15 cm, des tubes métalliques rétractables ont été insérés pour créer des hourdis (sept creux de 8 cm de diamètre par mètre). Les panneaux de murs avaient 14, 17 ou 20 cm d’épaisseur (selon la position dans le bâtiment) et la hauteur de l’étage. Tous les tuyaux, éléments de montage et encadrements de portes et fenêtres étaient placés dans les moules avant de couler le béton. Les escaliers étaient aussi préfabriqués, les escaliers droits en un seul tenant parfaitement lisse et entièrement fini. Trois jours après avoir coulé le béton, les éléments ainsi formés étaient démoulés et hissés par une grue pour être mis en place. Une fois installés, ils étaient connectés les uns aux autres avec du béton coulé sur place pour former une structure solide en béton armé capable de supporter des charges verticales et les actions du vent.
A mi-progression du projet, lorsqu’un second appel d’offres fut organisé, un nouvel entrepreneur (Strabed) fut choisi ; il utilisa le système Cauvet pour construire les immeubles à appartement IV, VI et VII. Dans ces immeubles, les hourdis avaient une portée de 5,50 m. Ils étaient composés de 5 cm de béton armé à la base, de creux rectangulaires de 11 cm d’épaisseur et d’une couche supérieure de 3 cm de béton armé. Les panneaux de murs se composaient de cinq couches successives : 4 à 6 cm de béton armé (avec une finition de surface ou non), 3 cm d’isolation de laine de verre (comprimés à 2 cm sous le poids du béton), une couche intermédiaire de béton armé de 3 à 4 cm, une âme creuse et une couche finale de 3 à 4 cm de béton armé pour la face intérieure. La couche d’isolation et le détail des creux mis à part, la technique de construction se basait sur un principe globalement similaire à celui du système Barets.